Quelles sont les politiques de développement des territoires ruraux en Croatie?

Le 15 janvier 2020 notre Commission des Affaires européennes a auditionné l’Ambassadeur de Croatie en France, Filip Vuèak, ainsi que le 1er secrétaire chargé des affaires économiques, Davor Dujiæ. L’occasion pour moi de les interroger sur 3 points : la politique agricole, la défense et le numérique :

  • « Votre ministre chargé des questions liées à la politique agricole commune a développé des concepts très intéressants sur la paysannerie familiale, l’installation des jeunes agriculteurs et, surtout, le développement des smart villages. Et la question forestière touche les villages au coeur dans tous les pays d’Europe. »
  • « Les questions de sécurité, qui sont fondamentales. Mais quid de la défense ? La présidence précédente a porté un coup au Fonds européen de la défense. Face aux menaces actuelles, qu’il s’agisse du terrorisme ou des incertitudes géopolitiques, le Fonds européen de la défense et le développement économique des industries européennes liées à la défense sont importants. Je n’ai pas senti cela dans votre intervention. Certes, tout ne peut pas être prioritaire. Mais si nous voulons que l’Union européenne prenne une certaine dimension, elle doit être un référent international pour ses États membres et pour les pays à ses confins. C’est une nécessité. »
  • « J’ai pris connaissance d’une initiative visant à soutenir le désenclavement rural par le numérique. Malheureusement, partout en Europe, la fracture numérique est une réalité dans le monde rural. »

M. Davor Dujiæ, premier secrétaire de l’ambassade de Croatie en France, chargé des affaires économiques, m’a répondu : « Pour les années à venir, en l’état, le cadre financier pluriannuel ne nous donne aucune visibilité. Or, c’est bien une priorité fondamentale.

Au niveau budgétaire, un grand contributeur net va quitter la famille européenne, il faudra donc faire des sacrifices et ventiler les dépenses différemment. Vous nous demandiez de préciser le seuil budgétaire que nous visons : nous sommes en effet opposés au seuil de 1,07 % du RNB. Je me réfère aux propos de notre Premier ministre dans une interview qu’il a donnée à France 24 juste avant de déjeuner avec M. Macron : nous soutenons la proposition qui émane de la Commission européenne, d’un seuil à 1,114 %.

S’agissant de la PAC, vous faisiez allusion à ce concept évoqué par la ministre de l’agriculture croate : la promotion des politiques de soutien aux petites exploitations familiales. Celles-ci incarnent en effet la possibilité de stopper un exode rural dramatique dans beaucoup de régions. Un autre concept doit être également évoqué, les smart villages, qui comportent une dimension de connectivité et de développement des services dans une approche durable visant à améliorer la qualité de vie des jeunes agriculteurs et des familles. Plutôt qu’une approche macroéconomique, il s’agit ici de favoriser une approche microéconomique prenant en compte la dimension humaine, ce qui constituera un enjeu fondamental de la prochaine présidence pour tous les pays européens qui subissent le fléau de l’exode rural.

La problématique du numérique nous concerne tous. C’est pourquoi la politique doit être transversale, et concerner les citoyens où qu’ils vivent, y compris dans les petites propriétés rurales. La Croatie va organiser une conférence ministérielle pour promouvoir les outils contribuant à améliorer la situation des petites exploitations familiales. Nous vous rejoignons sur ce point : c’est un enjeu majeur.

Concernant la PAC, il faut évoquer l’agriculture durable, directement liée au green deal. Nous en revenons donc à ce grand projet, qui comporte également un objectif de neutralité carbone pour 2050. Notre ministre de l’agriculture l’a dit, il est fondamental de prendre en compte les profils de différents pays ; notre Premier ministre, de même, appelait à s’intéresser à la situation particulière des États membres qui ont intégré l’Union européenne suite à des vagues d’élargissement successives. Tous les pays n’ont pas en effet le même profil énergétique. En France, par exemple, 60 % de l’énergie consommée émane du nucléaire. On y aborde, dès lors, la question de la neutralité carbone d’une façon particulière. En Croatie, en revanche, l’énergie nucléaire ne représente que 17 % de l’énergie consommée. Une approche sur mesure est donc bien nécessaire. Il en va de même en ce qui concerne la PAC : il faut développer la flexibilité pour inciter les États membres à favoriser l’agriculture verte en leur proposant un rythme adapté. »